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ASA PNE

ASA PNE

Association pour le Suivi de l’Aménagement Paris Nord – Est


Le dossier du mois : focus sur la MRAe

Publié par ASA PNE sur 8 Décembre 2021, 07:43am

Catégories : #Actualités, #Projet Urbain, #Paris Nord Est

En octobre dernier, France Nature Environnement Île de France dont ASA PNE est rattachée à travers sa fédération parisienne, a reçu Monsieur Philippe Schmit, Président de la Mission Régionale d'Autorité environnementale (MRAe). Cette instance, qui dépend du Ministère de la Transition Ecologique, est une émanation de l'Autorité environnementale (Ae) à l'échelle régionale. Elle est notamment chargée d'émettre des avis sur des programmes et projets d'aménagement. C'est pourquoi nous examinons et suivons les avis de cette instance par rapport aux projets urbains de Paris Nord-Est. A titre d'exemple dans nos contributions récentes, nous avons relayé et utilisé les avis de l'Autorité sur les opérations urbaines telles que la Gare des Mines, Chapelle Charbon ou encore le centre bus Belliard...Voici à présent ce que l'on peut dire de cet échange avec le président de la MRAe :   

La MRAe Ile de France, partenaire des associations

Les associations de défense de la biodiversité et de suivi des projets urbains étaient invitées à rencontrer Philippe Schmit récemment nommé président de la Mission Régionale d’Autorité environnementale d'Île de France. Cette rencontre a été organisée dans la perspective d’une collaboration plus régulière et efficace entre acteurs d’un urbanisme soucieux de la nature, de la santé et des parties prenantes dans une vision de respect des Objectifs de Développement Durable (ODD).

Une volonté d’élargir les sources d’information

Le travail de la MRAe, présenté par M. Schmit se déroule essentiellement en « chambre », sans lien direct avec la partie civile. Les actions de la mission créée en 2016 à l’issue d’actions de France Nature Environnement sont plus ou moins mises en avant. Elle est toutefois très présente notamment lors des études et des freins mis aux grands projets commerciaux qui font l’objet d’une étude de la Commission Nationale d'Aménagement Commercial (CNAC).

La vision de Philippe Schmit durant sa mandature de 3 ans est d’intervenir et se manifester auprès des élus afin de renforcer l’influence de la Mission et de s’imposer comme un référent sur les sujets de son périmètre d’intervention. La mission est pluridisciplinaire, elle associe les compétences d’un juriste, d’un urbaniste au fait des sujets autour de la densité, d’un architecte spécialiste des paysages et surtout d’un médecin de la santé publique. Ce point est particulièrement intéressant dans le contexte actuel et constitue un véritable atout pour les avis rendus.

Des moyens réduits et des besoins croissants

Disposant en théorie de 16 personnes placées sous l’autorité de la mission, celle-ci se trouve en difficulté du fait des réductions d’effectif et de salaires moins intéressants que ceux de l’Administration centrale. La charge de travail s’avère considérable et les délais de traitement trop longs par rapport à des procédures qui se veulent de plus en plus courtes.

La MRAe prend une décision par jour et dispose de 2 semaines pour mener son instruction mais dans la réalité des faits, les dossiers sont déposés tardivement ce qui ne laisse qu’une grosse semaine pour l’analyse. Les échanges internes laissent aux membres 2 à 3 jours pour réagir à une proposition et des délibérations sont prévues s’il n’y a pas d’accord en première lecture. Pour améliorer la qualité de l’avis dans des délais courts, la MRAe a besoin d’éléments externes aux dossiers qui permettent d’apprécier la réalité du terrain. Par ailleurs, le travail des membres se heurte à deux problématiques.

D’une part, l’absence d’une réelle phase préalable de rencontre avec le maître d’ouvrage, qui, au mieux reste informelle. L’un des objectifs de la MRAe est d’ailleurs de déterminer comment le maître d’ouvrage tient compte des recommandations. Il pourrait être pertinent d’envisager des recommandations de premier niveau ou second niveau pour mieux discerner les éléments majeurs mais la loi ne le prévoit pas.

D’autre part, la nécessité d’appliquer des règles déontologiques afin que d’anciens élus ne puissent intervenir sur des communes précédemment gérées ou sur des sujets en relation avec leurs fonctions d’élus.

Philippe Schmit expose clairement les conditions dans lesquelles les membres s’acquittent d’une tâche de plus en plus essentielle alors que l’Autorité Environnementale va perdre 500 postes selon les dernières annonces et que les réformes des PLU et de la gestion des carrières nécessitent davantage de prise en compte des ODD.

Concernant les Plans Locaux d'Urbanisme (PLU) et Plans Locaux d'Urbanisme intercommunal (PLUi), Philippe Schmit remarque un écart entre régions et l’Ile de France et note que le PLUi est plus complexe car moins normé que le PLU au niveau européen.

Concernant les carrières, il y a un réel manque de visibilité sur l’utilité et les vrais usages des avis de la MRAe alors que les projets se multiplient.

Les critères de santé désormais évalués

Tous les nouveaux avis intègrent désormais les valeurs guides de l’OMS, ce qui constitue une nouveauté et renforce la notion d’impact des décisions d’urbanisme sur la santé des populations.

Certains aspects sont toutefois difficiles à évaluer. L’exemple de l’incidence des moteurs électriques part d’une situation initiale et la tendance est à l’amélioration générale des conditions de vie, mais il n’y a pas modélisation au-delà de 3 ans ce qui limite l’analyse d’impact. La mission se rapproche d’universitaires pour avancer sur le sujet.

Si la MRAe n’exerce aucun contrôle de légalité sur les projets soumis, rôle dévolu au préfet, il lui appartient de veiller à la santé des populations.

Une réflexion à mener sur une plus large diffusion des avis de la MRAe

Pour favoriser la participation des populations aux consultations et les impliquer au sein d’associations, la MRAe souhaite rendre ses avis plus accessibles. Une population qui comprend les risques est à même de participer plus efficacement aux concertations. Philippe Schmit prend l’exemple des tribus amérindiennes du fleuve Maroni en Guyane qui ont été informées des risques liés à l’implantation d’un projet grâce à une déclinaison graphique des risques et recommandations.

La communication autour des enquêtes publiques reste une préoccupation.

Savoir interpréter les avis et recommandations de la MRAe

Les documents sont relativement formatés, et en ce qui concerne les éléments sur le climat et la qualité de l’air, il est nécessaire de disposer d’un document de cadrage permettant d’évaluer les conditions réelles d’implémentation bien en amont du projet. Mais les maîtres d’ouvrage se contentent souvent des infos AirParif qui sont assez globales.

Les mentions de la MRAe en bas de page sont toujours des sources d’informations complémentaires à exploiter pour pallier les faiblesses du dossier.

Des risques sous évalués et des élus mal informés

A la question de la prise en compte des risques incendies concernant les entrepôts qui se multiplient, Philippe Schmit répond que bien souvent, les élus ne sont pas assez bien formés sur ces problématiques. La MRAe se déplace auprès d’eux pour les sensibiliser mais les critères de choix pour les implantations se font souvent sur des bases économiques d’emplois créés plutôt que des risques encourus par l’ensemble de la population et l’intervention de la mission est souvent tardive.

Philippe Schmit souligne que le SDRIF (Schéma Directeur Régional d'Île de France) est assez permissif en matière d’entrepôts et la MRAe intervient souvent sans que le public soit informé de la démarche de préservation des populations. La MRAe dispose d’éléments qui restent confidentiels mais justifient ses recommandations.

Bien que les maires reçoivent le rapport annuel de la MRAe, ce n’est pas suffisant pour les inciter à suivre les recommandations et organiser des réunions avec les élus s’avère compliquée.

Il faut noter la sortie prochaine d’une étude sur les Data Center, qui préconise de limiter les créations inutiles et s’adresse notamment aux maîtres d’ouvrage. L’accent est mis sur la compétence sur les activités économiques qui relève d’intérêts communautaires et non de la commune au titre de la loi Climat et Résilience. Ainsi il est impératif d’évaluer la vacance des locaux avant implantation de tout nouvel entrepôt.

Paris étouffée et insuffisamment connectée aux réseaux écologiques

Philippe Schmit, en réponse à une interrogation sur les réseaux écologiques et la différenciation nécessaire entre les zones proches de forêts et les autres espaces, confirme que Paris souffre d’un problème de reconnexion aux réseaux écologiques du fait de communes limitrophes qui étouffent la capitale. Les continuités ne sont pas respectées, elles sont souvent traitées de manière superficielles et doivent être évaluées très en amont des projets. Idéalement, il faudrait démontrer la continuité dans les avis mais ce n’est pas chose facile. L’appel est d’ailleurs lancé de proposer la candidature d’un expert en continuité écologique qui viendrait renforcer l’équipe.

Former, informer, sensibiliser le monde politique

Une association mentionne que sur un projet communal sur le lit majeur de la Seine, et en l’absence de rendez-vous avec le responsable de l’urbanisme, les avis de la MRAe constituent une base de dialogue et la mission peut appuyer la démarche auprès des élus. Mais la gestion des risques reste un domaine de technocrates et le monde politique n’en n’a pas une connaissance approfondie, ce qui l’amène à une posture de déni. Désormais, le maire est destinataire des avis formulés en réponse aux formulaires "Cas par Cas" soumis à la MRAe.

Les avis de la MRAe relèvent du droit européen et sont destinés à éclairer les parties prenantes et ne sont en rien coercitifs. Ce sont les associations qui, en intervenant et engageant les recours, apportent la contrainte.

Il est toutefois nécessaire de sensibiliser le préfet pour tenir compte des avis le plus tôt possible pour éviter des recours. La MRAe incite par exemple à préciser le nombre de logements vacants en regard de chaque projet d’habitation soumis.

Un critère essentiel est l’incidence notable, notion définie au niveau européen, et qui détermine si la MRAe est saisie ou pas. Si le préfet estime, comme pour la majorité des cas de forages, qu’il n’y a pas d’incidence notable, les projets échappent à la mission.

Se pose la question de garantir l’indépendance vis-à-vis de l’instruction du préfet qui évalue lui-même cette notion.

La MRAe souhaiterait pouvoir intervenir auprès des bureaux d’études pour des échanges informatifs, et améliorer la fréquence des mises à jour sur les projets. Notamment pour détecter encore davantage les modifications successives des PLU et PC qui dénaturent un projet initial tout en le dispensant d’un avis de la MRAe.

La mission intervient par ailleurs, contre l’avis du maire, sur des projets de construction de logements qui ne sont justifiés que par la création de flux automobiles et qui ne répondent à aucun besoin avéré.

Des contacts sont à venir avec l’ANRU et la MRAe va produire également des préconisations dans le cadre du SDRIF, autant de démarches qui devront aider à la visibilité et l’usage des avis par les associations.

Enfin, Philippe Schmit signale que certains fonds aident à réaliser des projets réellement vertueux comme le fonds Friches mais il n’y a pas encore de projets probants.

Des associations qui témoignent de leur usage des avis et recommandations

Les associations présentes témoignent de l’utilité et la pertinence du site de la MRAe où sont publiés les avis très consultés et utilisés même si leur prise en compte par les aménageurs s’avère parfois difficile.

Les témoignages des associations sont tous unanimes à constater que les recommandations ne sont pas systématiquement prises en compte et que beaucoup de projets continuent sur leurs bases initiales. La contradiction entre le discours de l’Etat sur la préservation de l’environnement et les moyens mis en œuvre demeure assez flagrante.

A suivre, le compte rendu de FNE Ile de France et le lien du site de la MRAe Ile de France

MRAe : compte rendu de FNE Ile de France

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