Le 15 mai 2019, l'Autorité environnementale a rendu un avis assez critique sur le projet de la ZAC Gare des Mines-Fillettes.
Jugeant l'étude d'impact du projet insuffisante, l'Autorité pointe du doigt plusieurs sujets, en particulier elle alerte sur un risque sanitaire exprimé dans les termes suivants : "sans être par lui-même générateur d'une augmentation significative des trafics, ni en conséquence des nuisances sonores ou de la pollution de l'air, le projet, qui se développe à proximité immédiate et sur le périphérique, augmente la population exposée (1 200 habitants supplémentaires, soit +35% et 450 emplois) et de ce fait augmente le risque sanitaire associé, notamment en matière d'exposition aux émissions polluantes". Dans son avis, l'Ae demande à la ville de Paris "l'établissement d'un plan opérationnel à moyen terme de réduction des émissions polluantes, du périphérique notamment, et de prévoir un positionnement des bâtiments et un phasage de leur occupation cohérents avec la mise en oeuvre de ce plan".
Sur le contenu du projet avec l'Arena II qui sera le 1er équipement livré dans la perspective des JO 2024, "l'Ae recommande de présenter des éléments d'informations actualisés...concernant la gestion des flux supplémentaires de population et l'impact attendu sur les déplacements". Toujours à propos de la salle omnisports, l'Ae indique que "les spécificités des besoins de transport liés au fonctionnement d'un site événementiel tel que l'Arena II sont insuffisamment développées". Elle demande en conséquence que soient précisés "les besoins de transport et d'accueil du public spécifiques au fonctionnement de l'Arena II".
Dans son analyse de l'étude d'impact du projet, l'Ae déplore que "les résultats des concertations ne soient pas intégrés à l'étude". Elle demande qu'elles le soient ! Il est vrai que sur ce point, l'évolution du projet depuis fin 2017 en raison de l'intégration de l'Arena II n'a pas permis de réunir les conditions d'un processus de concertation satisfaisant (se reporter à nos dernières rubriques sur #Gare des Mines). Nous ne pouvons que le déplorer et demandons pour le second semestre 2019 un planning précis de la concertation !
Un catalogue de constats alarmants
Bien que l'emprise de la Gare des Mines ait été identifiée par le SDRIF (Schéma Directeur de la Région Île de France) comme "secteur à fort potentiel de densification", celui-ci reste très fortement exposé à toutes sortes de nuisances qu'il y aura lieu de traiter. Sur le plan des transports et déplacements, des études menées en 2017 ont mis en évidence "des axes dont le taux de saturation est déjà très élevé, sur le périphérique, mais également sur les axes sud-nord au droit des portes de la Chapelle et d'Aubervilliers". Les programmes de la ZAC vont contribuer à accroître "l'état de congestion".
En matière de bruit et vibrations, le site de la ZAC est très exposé. Les niveaux sonores relevés sont nettement supérieurs aux normes. L'Ae "recommande de préciser la situation des bâtiments existants du secteur de la ZAC vis à vis de leur éventuel classement en point noir de bruit, et le cas échéant les mesures qu'il est prévu de prendre pour les résorber". Par rapport au projet, elle "recommande de démontrer la suffisance des mesures de réduction du bruit en façade pour les bâtiments les plus exposés et la réalisation d'un mur anti-bruit". Pour l'Ae, le CDG Express qui passera à proximité du site "constitue une source vibratoire significative".
Même constat alarmant sur la qualité de l'air ! La pollution observée "est importante avec des concentrations en dioxyde d'azote (NO²) sur l'ensemble du domaine d'étude qui ne respectent pas les normes de qualité de l'air de 40 µg/m3 en moyenne annuelle". A partir de ce constat, elle demande "de revoir l'ensemble des résultats de mesure et de modélisation de l'exposition au benzène" puis "de reprendre l'évaluation des risques sanitaires en la focalisant sur la population actuelle et future de la ZAC".
Sur la pollution des sols et des eaux, un certain nombre de recommandations sont faites pour renforcer les "réseaux d'eaux usées, de gaz, d'électricité et de télécommunications, et de la gestion des déchets".
A propos des énergies renouvelables, l'Ae fait aussi un certain nombre de recommandations au regard de deux scénarios proposés. Elle "prend note d'une ambition renforcée de limitation de l'empreinte carbone de l'Arena II, par l'utilisation de matériaux bio-sourcés".
Les éléments soumis à l'Ae en matière de paysage et de patrimoine "ne permettent pas d'apprécier un éventuel effet de désenclavement par le projet". A titre d'exemple, L'Autorité relève "que l'espace autour de l'Arena II est extrêmement contraint par le réseau routier au niveau de la porte de la Chapelle. L'accueil du public nécessitera vraisemblablement un parvis de taille plus conséquente". C'est ce que nous avions mis en évidence quand le projet nous a été présenté. C'est pourquoi, nous avons remis en question les bâtiments situés au sud de l'Arena dans notre proposition d'aménagement de février 2019. Nous sommes heureux de voir que nos observations sont partagées par l'Autorité.
Objectif de 10 m² d'espaces verts par habitant !
La question des espaces verts constitue un véritable enjeu de qualité de vie et de préservation de la biodiversité sur ce secteur. A ce stade, l'Ae ne semble pas convaincue par les propositions d'aménagements de ces espaces. Ainsi, elle demande que soient précisées "les variantes étudiées en matière d'espaces végétalisés et les motivations de l'option retenue".
Sur les enjeux bioclimatiques, "le site du projet offre des surfaces minérales importantes et présente une forte disposition à générer des îlots de chaleur". Aussi, l'Autorité demande que soit confirmé "la volonté de prévenir les îlots de chaleur et de renforcer le couvert végétal par des engagements quantifiés sur les objectifs visés".
Enfin, l'Ae s'est penchée sur la compatibilité du projet avec le PLU et appelle à "vérifier la cohérence du projet" avec l'orientation d'aménagement et de programmation (AOP). Elle invite donc la Ville à "établir la manière dont le projet répond à l'orientation du schéma directeur de la région Île-de-France de tendre vers une densité d'espaces verts de 10 m² par habitant".
A travers cet avis très circonstancié de l'Autorité, nous constatons que cette opération de 20 ha, à cheval entre la porte de la Chapelle et la porte d'Aubervilliers, a encore beaucoup de chemin à faire pour apporter toutes les garanties nécessaires sur la plan environnemental. Comme nous l'avons exprimé précédemment, nous attendons la nouvelle phase de la concertation pour que soit validé, au delà des JO, notre proposition de maintien d'un parvis de l'Arena II sur le boulevard Ney. Nous serons attentifs à la programmation envisagée sur la ZAC en défendant un projet équilibré entre espaces bâtis et espaces non bâtis, conformément aux orientations du SDRIF. A cette occasion, nous confirmons notre opposition à des émergences de 50 m.
Le rapport complet de l'Autorité environnementale est à télécharger ci-dessous.
ZAC Gare des Mines-Fillettes : avis délibéré de l'Autorité environnementale - 15 mai 2019
L'Arena II au menu du prochain Conseil de Paris
Il se peut que le rapport de l'Ae soit évoqué lors du prochain Conseil de Paris du 8 juillet dans le cadre de la discussion autour d'une délibération à l'ordre du jour sur l'Arena II (ci-dessous en pièce jointe). Bien que l'objet de cette délibération ne concerne pas la question environnementale (elle porte sur une délégation de service public pour l'exploitation commerciale du site), l'avis de l'Ae qui évoque à plusieurs reprises le fonctionnement de l'Arena II sera peut-être au centre des discussions ?
A suivre, la délibération sur l'Arena II
Arena 2 : délibération sur une délégation de service public pour l'exploitation commerciale de l'équipement - juillet 2019